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Ces 2, 3 et 6 décembre 2021, les agents pénitentiaires de la prison de Saint-Gilles étaient en grève.

Durant des années, l’OIP a milité pour que le droit de grève des agents pénitentiaires soit encadré, de manière à limiter l’impact des grèves sur les droits des personnes détenues. Une loi a finalement vu le jour, la loi du 23 mars 2019 concernant l’organisation des services pénitentiaires et le statut du personnel pénitentiaire. Celle-ci prévoit la mise en place d’un service garanti même en temps de grève, avec une possibilité de réquisition des agents au-delà d’une grève de deux jours.

Cette loi a été, dans l’ensemble, mal accueillie au sein des agents pénitentiaires, qui y ont vu une volonté de les empêcher de faire valoir leurs droits, déjà difficiles à faire entendre. Le droit de grève, levier ultime pour attirer l’attention de la société civile et des médias sur la situation carcérale, leur était largement retiré. Cependant, force est de constater que deux ans après l’entrée en vigueur de la loi, les grèves de courte durée et à répétition continuent de fleurir, ou encore les grèves du zèle.

Outre le fait que ces grèves pèsent lourdement sur les droits des détenus (transferts à l’audience annulés, impossibilité pour l’avocat de voir son client, absence de visites, etc.), la volonté de faire grève des agents souligne que la loi du 23 mars 2019 n’a pas mis fin aux problèmes structurels de la prison. Parmi ceux-ci, la surpopulation, dont l’établissement de Saint-Gilles est coutumier.

Plus de 900 détenus sont détenus en ce moment à Saint-Gilles, pour 850 places. En temps de pandémie. Derrière les chiffres, la réalité crue de personnes placées au cachot quand elles arrivent, faute de pouvoir être mises en quarantaine dans des cellules. Des avocats qui ne peuvent pas voir leurs clients la veille de l’audience. Des détenus à bout, des agents en colère, des conflits, des frustrations, des travailleurs sociaux empêchés de faire leur travail.

La rengaine est ancienne, elle tourne en boucle depuis des décennies, sans solution. L’OIP s’égosille depuis sa création : construisez des prisons, remplissez-les, elles finiront toujours par déborder. Si la prison reste le point d’ancrage du système pénal, tous les acteurs de ce système continueront de se tourner vers elle. La prison est vue, aujourd’hui encore, comme la peine, la seule, la vraie.

Résultat : des lois qui créent de nouvelles incriminations, donc de nouvelles peines de prison, ou qui allongent celles qui sont déjà prévues. Des prisons qui se remplissent, et qui ont du mal à se vider. Pourtant, quand il a fallu prendre le taureau par les cornes en mars 2020, au début de la crise sanitaire, la population carcérale a fondu de plus de 10 % en l’espace de quelques semaines à peine.

Quand on veut, on peut. Et les statistiques criminelles n’ont pas explosé pour autant…

La construction de la prison de Haren est censée résoudre le problème de la surpopulation chronique de la prison de Saint-Gilles. Mais le nombre de places dans le parc carcéral belge n’a fait qu’augmenter depuis des années, et pourtant la surpopulation demeure.

Encore et toujours, l’OIP maintient sa position : la seule solution à la surpopulation, c’est que la prison ne soit plus la clef de voûte du système pénal. D’autres voies sont possibles.