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Les internés dans les annexes psychiatriques des prisons ou les établissements de défense sociale sont « les oubliés du système » comme le décrivait l’OIP dans sa notice 2016 (page 211 ici). Et parmi eux les « sans-papiers » sont sans doute encore plus oubliés. A l’inverse des autres, ils ne peuvent bénéficier de mesures d’aménagement de peine telles les permissions de sortie, congés pénitentiaires, surveillance électronique…Tout juste ont-ils le droit de végéter dans des établissements vétustes sans aucune perspective d’avenir.

Ces condamnés doivent cet horizon sans lumière à la loi « pot-pourri III » laquelle porte malheureusement bien son nom! Ainsi c’est ce texte entré en vigueur en 2016 qui a décidé de les exclure de ces aménagements de peine visant à préparer une réinsertion en Belgique.

Le hic et pas un petit hic, c’est que les « sans-papiers » ne peuvent espérer par définition s’installer en Belgique. Pour exemple, au centre de défense sociale de Paifve, le nombre d’internés en séjour irrégulier avoisine un dixième de la population totale. L’unique alternative, et elle est de taille, enfin de toute petite taille quasi invisible à l’oeil nu…est le retour vers le pays d’origine! Selon l’Office des étrangers, ceux-ci pourront y bénéficier de soins psychiatriques de qualité! Il fallait oser!

Un exemple valant mieux qu’un long discours, prenons celui du Maroc… Une grande majorité des « sans-papiers » internés proviennent de ce pays.

Dans le magazine « Diagonales », le psychiatre marocain Bouchaib Karoumi démontre combien son pays ne peut décemment pas se targuer de pouvoir prendre en charge les internés qui rentreraient au pays : « Le Maroc n’accorde pas d’importance à la prise en charge des malades psychiques, non seulement les personnes atteintes de troubles mentaux souffrent de la pénurie de structures adaptées, mais qui plus est elles sont confrontées à une stigmatisation omniprésente ».

Et de renchérir sur la condition des malades vivant loin des grandes villes où la pénurie est moins aigüe : « Dans certains villages, il n’est pas rare de trouver des malades psychiques vivant à même le sol, enchainées à un poteau ! »

Car si les familles sont comme partout le rempart contre la « désocialisation » du malade, une fois que les familles vieillissent et disparaissent, les patients sont dans certains pays livrés à eux-mêmes.

Si la Belgique a été régulièrement condamnée par l’Europe en raison du manque de soins apportés à ces personnes hautement fragilisées, le « pot-pourri » risque bel et bien de pourrir une situation intenable et inhumaine. Le Conseil de l’Europe souligne avec force combien les délinquants étrangers en séjour irrégulier ont droit aux mêmes mesures non privatives de liberté que les autres prévenus.

Sans aucune perspective de libération, un Homme n’est plus un homme. Il est un oublié. Et cet oublié porte un nombre : 9999…Chiffre écrit sur son dossier pour signifier une date de libération qui n’arrivera jamais. Comme une condamnation à mort. Les « sans-papiers » internés sont des sans-avenir…

Publié par l’OIP Belgique le 11 décembre 2017