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« Notre démarche se veut emblématique d’une volonté nouvelle d’aborder les politiques publiques sur la base de contrôles​​ exercés sur le terrain ». Voilà ce qu’a exprimé en France, la présidente de la commission des Lois de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. « Pour se forger une « vision personnelle et concrète » de ce sujet de société, les députés, de tous bords politiques, ont exercé leur droit de se rendre dans des centres pénitentiaires et des maisons d’arrêt, le plus souvent dans leur circonscription ou département d’élection (…) ». En se rendant sur les lieux, les députés souhaitaient constater « la misère, la promiscuité et la dureté de la vie carcérale ».1

Visite surprise et inattendue. En effet il n’est pas coutumier que des députés se rendent sur le terrain au préalable de leur travail en commission. En Belgique, la situation est similaire. Les membres de la commission Justice ne prévoient pas de visite de prisons avant de préparer leurs propositions de loi. Pourtant, lorsque l’on pousse les portes de ces établissements, nombreuses sont les réalités à constater. A de nombreuses reprises, le CPT2​​ a observé​​ dans ses rapports que la Belgique était coupable de torture ou de traitements inhumains et dégradants au sein des établissements de privation de liberté3. Mise à part cet organe européen, qui sont ceux et celles, en Belgique, qui se chargent d’exprimer à l’extérieur ce qu’il se passe à l’intérieur ?

Il existe pour chaque prison belge des Commissions de surveillance et un Conseil central de surveillance pénitentiaire. La​​ commission de surveillance se compose de plusieurs membres bénévoles qui assurent chacun à leur tour une permanence mensuelle. Durant cette permanence, les membres se rendent à la prison plusieurs fois par semaine pour relever les​​ boîtes aux lettres qui se trouvent dans les différentes ailes de la prison et dans lesquelles ils trouvent les rapports ou lettres des détenus qui souhaitent communiquer avec la commission. Les membres rendent visite aux détenus se trouvant au cachot, prennent connaissance du registre des sanctions disciplinaires, se rendent au centre médical, constatent l’état de la cuisine,​​ des douches, etc. Chaque mois, la commission se réunit et le commissaire du mois fait rapport, en partageant avec ​​ les autres membres​​ les constats qu’il a réalisés. Ces constats sont rapportés à la Chambre des représentants et des solutions sont alors recherchées pour être ensuite proposées par le président à la direction de l’établissement pénitentiaire.4

Malheureusement, les membres des commissions s’insurgent contre le fait que leurs interventions, remarques, demandes et propositions soient très rarement et peu suivies d’effets. Dans son rapport 2011-2014, le conseil central rapporte que seulement deux recommandations parmi les nombreuses faites dans le rapport 2008-2010 ont été suivies d’effet. Outre le manque de considération réservé à ces observations et recommandations, l’indépendance de ces organes n’est pas non plus correctement assurée et les ressources matérielles, humaines et financières mises à leur disposition pour exercer le contrôle sont clairement insuffisantes. Les Commissions de surveillance ont pourtant un​​ rôle crucial à remplir. Elles sont les seuls organes de surveillance entre les murs de la prison et sont censées rapporter leur travail à la Chambre des représentant pour nourrir la réflexion législative.5

Il est dès lors légitime de penser qu’une prise d’initiative des parlementaires sur ce sujet ne serait pas inutile. Les voir pousser les portes de la prison pour constater les nombreux manquements et dysfonctionnements et se pencher sur la question des commissions de surveillance, ferait du bien aux défenseurs et défenseures des droits de l’Homme. L’appel est lancé.